Drôle de Blase

Article de Sophie Polvorinos pour Reflets d’Allier

 

Cuisinier, marchand d’art, artiste inspiré… Blase a multiplié les vies pour atteindre un objectif : se sentir libre. Peu enclin aux contraintes et pas spécialement mondain, il grandit dans les années 80 à Cusset auprès de parents antiquaires. Par porosité, ils lui donnent le goût du beau savoir-faire. Pas franchement adepte de l’école, qu’il arrête à 15 ans, sa mère lui dégote du jour au lendemain une formation en cuisine. Le cursus lui apporte une véritable appétence pour les voyages mais pas une carrière, brisée dans l’œuf à 20 ans en raison d’une maladie auto-immune.

D’abord Rubens

Le destin s’articule autrement. Il y a un premier choc pictural : « J’étais avec mon père chez un de ses clients. Je suis tombé en pamoison devant un dessin dans une descente d’escalier. C’était un travail préparatoire d’un tableau de Rubens. » Puis viennent les cours photocopiés d’un pote en histoire de l’art. C’est assez pour créer un désir d’orientation. Pour Blase, « pas poss’ de rester ici ». Il monte à Paris. Le nouvel étudiant en histoire de l’art se dégote un contrat de qualification chez un grand marchand de tableaux sur le prestigieux quai Voltaire. Le jeune homme percute vite, est astucieux et malin. « Après mes études, je me suis mis à mon compte pour vendre des tableaux mais j’ai des goûts de riche », évoque le futur artiste alors en manque de trésorerie. Une nouvelle bascule se produit. Pour répondre à ses aspirations du beau, il se met à restaurer des tableaux. « J’ai commencé en autodidacte. Je n’avais pas les finances pour faire une école et, de toute façon, je ne n’aurais pas eu la motiv’ pour les cours théoriques », note Blase, qui se connaît bien. Au début, il n’est pas franchement bon, colle régulièrement les tableaux sur les plans de travail… Mais il veut ça ! Il s’en donne les moyens en achetant des œuvres « avec de lourdes pathologies » et arrive, après maints déboires, à convaincre un ancien restaurateur de lui transmettre son tour de main. « Je vendais mes tableaux sans dire que je les avais restaurés. J’aime assez l’idée de faire des faux de manière légale », déclare l’artiste, qui a choisi de mettre son « moi » civil de côté pour mieux s’exprimer et faire de son nom d’artiste une marque à part entière.

Dada & Cie

Joueur, il hake les toiles : il revisite des tableaux du XIXe siècle en ajoutant des détails anachroniques, la plupart du temps issus de la pop culture. Les ruptures narratives interpellent les cerveaux les plus aguerris. Lui, digne héritier des dadaïstes, se marre, parodie, provoque. Quant à son travail, il plaît. Il expose aux États-Unis, en Europe, comme à Bruxelles chez Pierre Bergé & Associés. Il vend aussi, surtout à des étrangers et sans passer par des galeries : « J’ai des coûts de production élevés et je dois répondre à une logique marchande si je veux payer mon loyer. » Blase n’est pas un artiste de rendement. Il dit d’ailleurs se laisser distraire facilement. Actuellement, il nourrit une nouvelle passion pour les réseaux sociaux où il est très actif. Cependant, il reste accroché au réel, avec des envies très concrètes, comme la réalisation d’une sculpture et d’autres « trucs », pas encore signés mais qui devraient apporter une nouvelle visibilité à son œuvre.

Previous
Previous

PIMP MY PATRIMOINE

Next
Next

“Blase, le manipulateur”