COCAINE BLUES
Cette peinture à l’huile de la fin du XIXe siècle a été réalisée à l’origine par Sébastien Norblin, également connu sous le nom de Sobeck. Lui-même polonais, ce dernier mettait en lumière la diaspora polonaise à Paris, ville où il a élu domicile. Cocaine Blues présente un homme assis, sa main délicatement posée sur le dossier du siège, laissant apparaître le dos de sa main qui retombe avec une certaine décontraction. L'homme, d'une beauté saisissante, se pare d'une élégance rare, arborant une peau pâle et des joues légèrement rosées. Ses cheveux d'un noir profond échoient harmonieusement à ses vêtements, tous de teinte sombre, créant ainsi une composition visuelle intense, baignée de sobriété et de contrastes.
Le détournement opéré par Blase en 2022 vient ajouter une couche de complexité à cette pièce déjà intrigante. Après une restauration méticuleuse, l'artiste appose deux tatouages sur la main de l'aristocrate représenté : une rose de style traditionnel américain sur le dos de la main, ainsi que le mot "H A T E" inscrit sur les phalanges. Ces tatouages, bien qu’anachroniques dans leur représentation, s'intègrent parfaitement à l'esthétique d'ensemble de l'œuvre. Les tatouages étaient en effet déjà en vogue à l'époque, même dans les plus hautes sphères de la société, comme en témoigne le dragon asiatique tatoué sur l'avant-bras du tsar Nicholas II au début du XXe siècle. Cette transformation audacieuse enrichit notre perception de la personnalité de l'homme dépeint, le libérant de l'image stéréotypée souvent véhiculée par les peintres académiques de l'époque. Cette adjonction tatouée confère à cet individu une aura de mystère et d'originalité, suscitant notre curiosité quant à son identité et à ses motivations, notamment le choix de mêler fleurs et haine.
À noter également que le processus de détournement ne se limite pas à l'œuvre elle-même. La nécessité de restaurer l'œuvre originale, en raison de la détérioration du cadre d'origine, a engendré un changement significatif. Le nouveau cadre, richement orné de motifs floraux dorés, entretient un dialogue subtil avec le motif de la rose tatouée, renforçant ainsi la cohérence visuelle et conceptuelle de l'œuvre détournée.